La transformation numérique dans le secteur médico-social
Les acteurs des secteurs social et médico-social d’Ile-de-France se sont particulièrement mobilisés ces derniers mois autour des enjeux du numérique en santé. Aujourd’hui, « 2 200 ESMS sont embarqués sur les 6 500 établissements cibles de la région et pour un engagement financier de plus de 31 millions d’euros » rapporte Solenne de Zélicourt, directrice adjointe de la direction autonomie à l’ARS Ile-de-France. Il faut dire que les ambitions étaient fortes de « faciliter la coordination entre les acteurs tout en améliorant les parcours et l’accès à l’information des patients ».
Pour donner un coup d’accélérateur au processus d’informatisation métier, l’ARS s’est appuyée sur deux programmes :
- le programme ESMS numérique directement adressé aux établissements, dont l’objectif est de généraliser le Dossier Usager Unique en offrant des financements conditionnés aux usages ;
- le programme SONS qui permet d’accompagner les montées de version des solution éditeurs et de favoriser l’innovation.
« Le médico-social et le numérique, une histoire récente mais qui va durer »
Les premiers indicateurs sont positifs et prouvent les efforts et avancées réalisés. Le secteur des personnes âgées et du domicile est parti le premier, suivi aujourd’hui par les secteurs spécifiques, de l’enfance et de l’insertion. Une étude réalisée par l’ARS à l’automne 2023 permet de compléter les données du tableau de bord de la performance et confirme que si les usages sont encore hétérogènes, le DMP et l’INS sont les services socles les plus déployés (sur respectivement 63 et 60% des établissements ayant répondu).
« Le médico-social et le numérique, c’est une histoire récente mais qui va durer » assure Mehdi Zine, responsable de projets à l’Agence du Numérique en Santé. « Nous sommes persuadés qu’il peut et doit être un levier pour accompagner les défis qui attendent le secteur : décloisonnement, accès aux données, place des aidants, … » continue-t-il. Convaincue que l’aventure ne peut être que collective, « l’Agence du Numérique en Santé essaie de l’incarner au quotidien en intégrant les acteurs de santé dans les groupes de travail, en allant régulièrement sur le terrain, en identifiant les irritants qui permettent de nourrir la feuille de route » poursuit-il. Le secteur médico-social est en effet désormais partie intégrante de la feuille de route du numérique en santé. Preuve en est l’accès des professionnels du secteur à un numéro RPPS ou encore l’évolution de la matrice d’habilitation du DMP.
Quoiqu’il en soit, tous autour de la table s’accordent à dire que ces projets n’appellent pas seulement des déploiements de solutions techniques mais aussi un accompagnement fort au changement et à de nouveaux usages. Comment s’y prendre ? Quels sont les leviers ?
« La clé de la réussite ? L’information ! »
Le groupe ARPAVIE a candidaté à l’appel à projet ESMS Numérique dès 2021 et mis ainsi en place trois services socles : l’INS, le DMP et la MSS. Chaneze Mehalla, responsable applicatif SI Santé, témoigne de l’intérêt de monter une phase pilote en amont avec une poignée d’établissements. « Même si on avait évidemment testé les solutions et qu’on savait que ça marchait, les utilisateurs ont toujours des retours d’amélioration. Ils ont pu être remontés à l’éditeur et intégrés à la solution finale ». La clé de la réussite ? « L’information ! » s’exclame-t-elle. « Nous avons organisé des sessions d’information avant même le déploiement et expliqué aux établissements le programme ESMS numérique, les services socles et les intérêts pour les résidents au quotidien. Il faut qu’ils soient informés des avantages d’utiliser le service ». Pour l’INS, le groupe s’est notamment fait accompagner sur le terrain par une assistance à maitrise d’ouvrage qui a vraiment permis d’accélérer les usages. Une difficulté majeure réside cependant dans le turn-over des équipes, véritable défi pour la formation. Comment faire en sorte de maintenir les usages ? Le groupe travaille encore à la recherche de solutions pérennes.
Une stratégie plus large que celle d’un « simple » SI
Autre témoignage, celui de l’association Entraide Union. Le groupe d’établissement s’est inscrit dans un appel d’offre de SESAN avec deux objectifs : accompagner la transformation de l’offre de ses établissements et travailler sur la question de la data pour s’assurer de disposer d’une donnée vérifiée, sécurisée et exploitable à l’échelle de l’organisme gestionnaire, de l’établissement comme de l’usager. Marc Degenetais, directeur général adjoint chargé du pôle Activités et Projets d’établissements d’Entraide Union, justifie d’ailleurs le choix de la direction d’en faire un projet stratégique porté par les métiers et non par les SI. Il souligne aussi la nécessaire articulation des temporalités ; celle des échéances nationales étant souvent différente de celle de l’organisme gestionnaire, de l’établissement et même du bénéficiaire. Il rassure cependant sur la culture numérique du secteur. « La maturité est évidemment moins forte que dans d’autres secteurs de la santé, mais on a vu une évolution depuis 2012. Avant l’approche était descendante, maintenant, on commence à répondre à des demandes du terrain ». Là encore, à l’image de Chaneze Mehalla, il rappelle l’importance de donner du sens à l’outil et de cerner les besoins terrain. « Quand on analyse les indicateurs d’usage, on constate bien souvent que l’hétérogénéité vient du fait que parfois la rencontre entre le besoin et la solution ne s’est pas faite ».
La cybersécurité, l’enjeu de demain
Les échanges ont également permis de revenir sur les enjeux du secteur autour de la cybersécurité. Particulièrement vulnérable, il n’est pas forcément bien informé sur les appuis dont il peut disposer. « Il ne faut pas penser que la sécurité doit être portée par des outils complexes et couteux » rassure Rémi Tilly , directeur du département SSI à SESAN. « On peut faire des choses simples qui permettent d’assurer une meilleure sécurité, comme changer un mot de passe par défaut, faire évoluer le système de sauvegarde ou mieux sécuriser les postes de travail. Mettre en place des actions de sensibilisation est aussi très efficace » explique-t-il. Là encore, SESAN est en capacité d’accompagner l’ensemble des établissements de la région et ils ne doivent pas hésiter à frapper à sa porte.
REPLAY :
INTERVIEW DE MARC DEGENETAIS :
Intervenants de la conférence :
– M. Mehdi ZINE, Responsable de projets médico-social, ANS
– Mme Solenne de ZELICOURT, Directrice Adjointe de la Direction de l’Autonomie, ARS Ile-de-France
– Mme Chanese MEHALLA, Responsable applicatif SI Santé, DSI, ARPAVIE
– M. Marc DEGENETAIS, DGA chargé du Pôle Activités et Projets d’établissements, ENTRAIDE UNION
– M. Rémi TILLY, Directeur du Département SSI, SESAN