eSanté en Ile-de-France – ARS IDF
Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics s’efforcent d’améliorer la coordination des parcours de santé pour offrir aux patients une prise en charge plus fluide et mieux adaptée à leurs besoins.
Dans un contexte de complexité croissante des soins, en particulier pour les patients atteints de maladies chroniques ou en situation de vulnérabilité, divers dispositifs ont été mis en place pour renforcer la collaboration entre les acteurs de santé. Parmi ces initiatives figurent le développement des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), les Dispositifs d’Appui à la Coordination (DAC) et le déploiement de Plans Personnalisés de Coordination en Santé (PPCS). A chaque fois, les mêmes enjeux : éviter les ruptures de prise en charge et assurer un suivi continu et personnalisé pour chaque patient.
Prévu dans la stratégie nationale « Ma santé 2022 », le programme e-Parcours initié par la direction générale de l’offre de soins (DGOS) ajoute une pierre à l’édifice en mettant à la disposition des professionnels des secteurs sanitaire, médico-social et social les outils numériques qui faciliteront leur coordination.
DMP, MSSanté et Santélien : trois briques numériques complémentaires
« En Île-de-France, la déclinaison de programme e-Parcours s’est d’abord traduite par un dispositif d’animation territoriale et d’accompagnement destiné à favoriser l’appropriation des outils numériques par les professionnels », indique Monia Meddah, pilote régionale du programme e-Parcours et du déploiement du Répertoire Opérationnel des Ressources en santé (ROR).
Dans chacun des 22 territoires de coordination franciliens l’ARS a ainsi missionné un chef de projet e-santé, employé par un DAC, une CPTS, un hôpital ou une association de professionnels libéraux. En lien avec la feuille de route pilotée et animée par les délégations départementales de l’ARS, ce chef de projet est là pour accompagner les professionnels et identifier avec eux la pertinence de l’usage du numérique dans leur pratique collaborative au quotidien. Il les aide notamment à choisir le bon outil numérique en fonction des objectifs de coopération, ce qui peut parfois conduire les professionnels à reconsidérer leurs processus de collaboration au regard des apports du numérique.
« Sur la base de ce travail nous leur proposons les solutions les plus adaptées aux besoins exprimés et nous les accompagnons dans leur prise en mains », poursuit Monia Meddah. La boîte à outils numériques de la coordination des parcours de santé comporte trois éléments principaux :
- le Dossier Médical Partagé, ou DMP (accessible via Mon Espace Santé), carnet de santé numérique du patient qui le suit tout au long de sa vie et qui contient l’ensemble des informations et documents utiles à sa prise en charge (ordonnances, comptes-rendus d’examen ou d’hospitalisation, lettres de liaison…),
- la Messagerie Sécurisée de Santé (MSS) pour l’échange entre professionnels d’emails contenant des données nominatives de santé
- et la plateforme régionale numérique de coordination des parcours Santélien, lancée par l’ARS Ile-de-France et le GRADeS SESAN
Un bouquet de services complets
« Santélien s’appuie sur la solution de l’éditeur Coexya qui a été enrichie de fonctionnalités répondant à de nouveaux besoins exprimés par les futurs utilisateurs », indique Bruno Xoual, responsable du département « Systèmes d’information en santé » de l’ARS. « La raison d’être de cet outil est de permettre aux professionnels d’échanger rapidement des informations et d’organiser la prise en charge conjointe d’un patient avec un suivi facilité. »
Déployée progressivement, Santélien repose sur le concept de cercle de soins, qui rassemble l’ensemble des intervenants autour d’un patient : professionnels et structures. Elle propose de nombreuses fonctionnalités. La messagerie instantanée, disponible pour tous les professionnels depuis mai, offre une communication sécurisée et conforme à la réglementation en matière d’échange de données de santé. Depuis novembre, l’outil s’est enrichi du dossier de coordination qui comprend notamment le cahier de liaison numérique, qui simplifie le partage d’informations essentielles entre membres du cercle de soin.
Les tâches et listes de travail facilitent quant à elle l’organisation, en permettant de prioriser les actions ou de regrouper des patients par thématiques. Une autre nouveauté majeure réside dans la possibilité pour un professionnel de solliciter dans l’outil des équipes ressources pour des prises en charge spécifiques : ces demandes de prise en charge sont accompagnée de notifications paramétrables, qui alertent sur les événements importants du parcours de soins. Enfin, l’interopérabilité avec les outils existants dans les établissements de santé permet de limiter les ressaisies et garantit une continuité optimale des soins.
« A la veille du lancement du dossier de coordination numérique, Santélien avait déjà séduit plus de 1 200 utilisateurs depuis le lancement en février dernier de la fonctionnalité de messagerie instantanée, c’est un signe encourageant, sachant que le bouquet de services proposés sera encore enrichi dans les mois qui viennent pour mieux répondre aux besoins des patients et des professionnels », conclut Bruno Xoual.
Priorité aux parcours de santé
Il y a un peu plus d’un an, l’ARS présentait son Projet régional de santé 2023-2028. La structuration des parcours en santé est l’un des axes phares de cette feuille de route mise au service de la santé des franciliens.
Issu d’un long travail de co-construction avec les partenaires de l’ARS, le nouveau Projet régional de santé (PRS) se veut à la fois stratégique et opérationnel, avec un vaste ensemble de mesures concrètes élaborées pour répondre aux grands défis du système de santé d’aujourd’hui. La structuration des parcours de santé fait partie des problématiques prioritaires et constitue l’axe 2 du projet. Dans un contexte de fortes disparités sociales et territoriales, l’enjeu est clair : garantir une prise en charge adaptée aux besoins des patients tout au long de leur vie.
Dans cette perspective, le PRS ambitionne de renforcer l’articulation et la lisibilité des parcours de santé pour assurer une prise en charge coordonnée, sans rupture, qui intègre les besoins et les choix des patients tout en étant adaptée aux réalités territoriales. En s’appuyant sur les modes d’organisation déjà en place – dispositifs d’appui à la coordination (DAC), communautés 360, communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) – le PRS vise plus spécifiquement à renforcer les actions de prévention et d’éducation à la santé, à mieux structurer les liens entre les différents acteurs (ville-hôpital, sanitaire-médico-social) et à donner davantage d’outils aux usagers pour s’orienter au sein du système de santé régional.
Outre le renforcement de l’usage du numérique au service de la coordination des acteurs, plusieurs actions phares sont prévues dans ce cadre. Elles porteront en particulier sur la structuration d’un service public départemental de l’autonomie, le développement de l’offre d’accompagnement pour les personnes en situation de handicap, l’optimisation de l’offre de relais et de répit pour les aidants ou le renforcement de la place de la santé mentale dans tous les partenariats noués par l’ARS.
Santélien à l’épreuve du réel
Elles utilisent la nouvelle plateforme de coordination depuis plusieurs semaines… Quels sont leurs premiers retours ?
Dr Adèle de Malherbe, directrice de Dactys (DAC Yvelines Sud)
« En tant que directrice de Dactys, l’association qui porte le DAC Yvelines Sud, je suis plus que convaincue de la nécessité d’un outil permettant d’interfacer les différentes structures qui interviennent tout au long du parcours des patients, en particulier pour les publics vulnérables et les situations complexes. J’ai d’ailleurs participé à la démarche Terr-eSanté depuis ses débuts et nous souhaitions nous servir de la plateforme pour un parcours sur les troubles cognitifs, mais elle ne répondait pas vraiment aux besoins. Avec Santélien, c’est le jour et la nuit ! Nous l’utilisons depuis février dans le cadre du parcours sur la vie après un arrêt cardiaque vasculaire construit avec le centre hospitalier de Versailles, et les différents outils proposés répondent parfaitement à nos attentes en termes de fonctionnalités et de prise en main. Nous avons également commencé à l’utiliser pour un autre parcours dédié à la lutte contre les chutes. »
Dr Marine Paul, anesthésiste-réanimateur, centre hospitalier de Versailles
Chaque année, une trentaine d’habitants des Yvelines survivent à un arrêt cardiaque. Mais ce statut de survivant cache souvent des séquelles cognitives et psychologiques liées à l’anoxie subie. Or, rien n’existe pour prendre en charge ces situations, ni même les repérer. C’est ce qui m’a amenée à construire depuis 2021 un parcours post-arrêt cardiaque en impliquant de nombreux acteurs : spécialistes de la médecine physique et de réadaptation, orthophonistes, cardiologues, psychologues, médecins agréés pour le permis de conduire, sans oublier l’infirmière de coordination qui fait le lien entre tous les acteurs et avec le patient. Mais jusqu’à présent, nous n’avions pas d’outil adéquat pour échanger nos observations ni même pour transmettre les données de santé et nos méthodes artisanales étaient chronophages ! L’arrivée de Santélien a tout changé : tout est beaucoup plus simple et plus sûr qu’avant, la plateforme est facile à utiliser et la coordination de ces parcours complexes devient enfin une réalité. Cet outil va même nous permettre d’étendre le parcours à toutes les Yvelines… Il ne reste plus qu’à espérer que tous les professionnels de nos cercles de soins s’inscrivent sur Santélien.
Dr Marie-Laure Alby, médecin généraliste à Paris
J’ai beaucoup cru à Terr-eSanté que j’ai utilisé pour certains de mes patients souffrant de troubles cognitifs. Lorsque, après un audit, l’ARS et le Sesan ont décidé de remplacer la plateforme, c’est tout naturellement que j’ai participé au comité d’utilisateurs, pour représenter la CPTS Paris 13/14. Nous avons identifié les limites de Terr-eSanté, précisé les briques à conserver (cercle de soins, listes des tâches) et celles à ajouter, comme la messagerie sécurisée. La bascule est toute récente et nous n’avons pas encore beaucoup de recul, mais les premiers retours sont globalement positifs.